Parfois confondues, les heures complémentaires et les heures supplémentaires ne peuvent pas être mobilisées selon les mêmes règles, même si les deux permettent en général de répondre à un surcroît de travail.
S’il fallait résumer, on pourrait dire que l’heure complémentaire pour le salarié à temps partiel équivaut à l’heure supplémentaire d’un salarié à temps complet. Mais le langage commun les différencie rarement et pourtant, chacune s’applique dans des circonstances bien précises. Et de ce fait, les erreurs sont relativement faciles à commettre pour les chefs d’entreprise, mais aussi pour les salariés. Rarement intentionnels, ces manquements ont pourtant des conséquences importantes. Les litiges portant sur une mauvaise application des heures supplémentaires comme des heures complémentaires, sur une rémunération mal définie ou encore sur une procédure non appropriée à la situation sont fréquents. Les jugements des conseils de prud’hommes sont alors souvent implacables et lourds à assumer sur le plan financier pour une entreprise, d’autant que la situation peut aussi être aggravée par des sanctions pénales. Autant dire que le recours à ces deux types d’heures ne doit pas se faire à la légère. Mais il ne doit pas non plus être banni de la palette à disposition de l’entreprise pour faire face à un accroissement temporaire de travail, car les heures supplémentaires comme les heures complémentaires sont toujours des systèmes efficaces pour gérer un surcroît d’activité.
La mise en œuvre
Le recours à ces deux dispositifs est laissé à l’appréciation de l’employeur qui mobilise de telles solutions lorsqu’il est face à une charge de travail exceptionnelle. Bien souvent, le recours à ce type d’heures est dicté par l’urgence, or vitesse et précipitation ne vont pas toujours de pair avec le respect de la procédure… Théoriquement, l’employeur doit solliciter le salarié par écrit. S’il s’agit d’heures complémentaires, cela doit être fait au moins 3 jours avant la date à laquelle les heures complémentaires sont prévues, ou si les heures complémentaires sont accomplies au-delà des limites fixées par le contrat de travail. La loi n’est pas aussi explicite pour les heures supplémentaires, mais le délai de 3 jours est à garder en tête. Un salarié ne peut pas refuser d’effectuer une ou des heures supplémentaires, sauf à avoir un motif “légitime”, notamment si les heures supplémentaires vont au-delà de la durée maximale du travail ou si l’employeur refuse de les rémunérer en majorant leur taux. « Le refus d’exécuter les heures supplémentaires peut constituer un motif de licenciement pour cause réelle et sérieuse », prévient Me Nathalie Lailler, avocate au barreau de Caen. Parfois même, une faute grave puisque la gravité de la faute s’apprécie en fonction de la justification de la demande de l’employeur et des raisons du refus du salarié. Le cadre est différent pour les heures complémentaires. Là, le salarié peut refuser d’accomplir des heures complémentaires au-delà des limites fixées par son contrat de travail sans s’exposer à une faute ou à un motif de licenciement.
La rémunération
Heures complémentaires comme heures supplémentaires impliquent une majoration de salaire définie par la convention collective ou un par un accord de branche. À défaut, le Code du travail s’applique. Les heures complémentaires voient leur rémunération majorée de 10 % pour chaque heure complémentaire accomplie dans la limite de 1/10 de la durée de travail fixée dans le contrat, puis de 25 % pour les heures complémentaires supérieures à 1/10 de la durée contractuelle.
Pour les heures supplémentaires, selon le Code du travail, la rémunération doit être augmentée de 25 % pour chacune des 8 premières heures, soit de la 36e à la 43e heure, et de 50 % au-delà. Si une convention ou un accord ou l’employeur le prévoit, la rémunération des heures supplémentaires peut être remplacée, en partie ou en totalité, par un repos compensateur équivalent.
En revanche, elles ne peuvent en aucun cas être payées sous forme de primes ou par un cadeau.
Enfin, les heures supplémentaires doivent être clairement mentionnées sur le bulletin de salaire en précisant le nombre d’heures faisant l’objet d’une majoration et le taux de majoration applicable.
Les sanctions
L’employeur ne respectant pas ces dispositions pour organiser et rémunérer des heures complémentaires ou des heures supplémentaires s’expose bien évidemment à des sanctions. Ces dernières se limitent à des peines civiles pour les heures complémentaires. Ainsi, si les heures complémentaires portent la durée de travail accomplie par un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale ou de celle de la durée conventionnelle de travail (si celle-ci est inférieure), le salarié peut demander une requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein. Lorsqu’il s’agit d’heures supplémentaires, si elles portent la durée de travail hebdomadaire au-delà de 48 heures ou la durée quotidienne à plus de 10 heures, les sanctions civiles sont assez durement paramétrées, mais l’employeur peut également se retrouver avec une condamnation pénale allant jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Et même 5 ans et 75 000 euros d’amende si l’infraction concerne plusieurs personnes ou une personne vulnérable. Devant le conseil de prud’hommes, le défaut de paiement à titre habituel des heures supplémentaires permet au salarié d’obtenir une indemnité spéciale de travail dissimulé. « Cette indemnité est forfaitaire et équivaut à 6 mois de salaire », précise Me Lailler. L’employeur est aussi passible d’une sanction pour “prise d’acte de rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur” qui s’accompagne de dommages et intérêts et d’indemnités à verser au salarié.
La prise d’acte de rupture validée par la justice a, en effet, les mêmes conséquences qu’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Texte : Françoise Sigot