Interview avec Daniel Ricard et Anne-Catherine Philippe.
Texte : Sébastien Carensac
Pourquoi vous être engagé dans une démarche de réduction de votre empreinte écologique ?
Pour l’instant, le marché bénéficie du changement climatique avec l’augmentation des températures et les canicules que nous rencontrons depuis 3 ou 4 ans. Les consommateurs investissent plus dans les piscines et ont donc davantage besoin de les entretenir.
À moyen terme, il faut s’attendre à des restrictions d’eau, notamment en France, qui peuvent venir limiter son renouvellement dans les bassins. La consommation d’eau est un vrai sujet que nous percevons dans les préoccupations des consommateurs. Cela va de pair avec la consommation électrique mais plus pour des raisons économiques qu’écologiques. En Allemagne, par exemple, la grosse tendance est de chauffer sa piscine avec des panneaux solaires.
Tous les acteurs du marché se mettent en marche par sensibilité écologique. Nous voulons tous bouger en faisant attention à nos achats aussi bien en tant qu’industriels que consommateurs pour réduire notre impact sur l’environnement. Ce n’est pas une crainte mais cela vient impacter nos décisions stratégiques.
Quelles pratiques avez-vous déjà changées ?
Nous avons été l’un des premiers à parler de l’équilibre de l’eau, de la désinfection, de la floculation et des algues. Nous ne sommes pas pour la surconsommation de produits. Nous parlons aussi de prévention des problèmes pour éviter l’usage massif des produits chocs. Il faut essayer de faire mieux avec moins, d’apporter le bon produit au bon moment. C’est dans notre ADN.
Le traitement raisonné passe aussi par la régulation automatique de la piscine. C’est le moyen le plus écologique pour traiter une piscine aujourd’hui, avec des appareils ayant une « intelligence » du traitement automatique, capables d’analyser et de fournir le juste dosage de bon produit au bon moment. Nous développons aujourd’hui des appareils de traitement automatique plus adaptés aux besoins de la moyenne des piscines privées en termes de simplicité d’utilisation et d’installation.
Nous sommes très attentifs à la qualité des matières premières que nous utilisons et réévaluons en permanence la concentration et l’efficacité de nos formules pour que le traitement soit le plus efficace possible avec la juste dose.
Nous faisons enfin très attention à nos consommations de matières plastiques, surtout pour la piscine privée, en essayant de trouver le bon équilibre entre la quantité de plastique d’emballage nécessaire et la sécurité du stockage et de la manipulation du produit. Cela demande des tests et donc des démarches longues. Nous faisons aussi des tests sur de nouveaux matériaux pour remplacer partiellement le plastique.
Sur nos sites de production nous avons changé tous nos outils et travaillons beaucoup sur la qualité de l’air et sur la filtration pour rejeter le moins de particules possibles. La sécurité dans les usines comme dans les bureaux est aussi un de nos axes de travail. Nous avons même un guide à destination des commerciaux pour réduire la consommation de leurs voitures.
Quelles autres pratiques souhaitez-vous faire évoluer ?
L’obsolescence programmée a été bannie de chez Bayrol depuis très longtemps. Pour nous, moins les appareils tombent en panne et plus nous sommes contents. Nous avons des régulations automatiques qui fonctionnent toujours après 20 ans et sont là pour durer. Nous travaillons aussi sur la durée de vie et la réparabilité de nos produits, des critères qui entrent dans la conception de nos produits.
Quelquefois, nos efforts peuvent être contrecarrés par la législation comme celle sur les concentrations de produits par exemple : avec des produits plus dilués, il va falloir 3 fois plus de produits donc d’emballages, de transport… Nous ne proposons pas non plus de promotions sur les produits : nous ne voulons pas de surconsommation mais une bonne utilisation.
Quelles approches devraient changer selon vous ?
La clé, c’est l’automatisme. En basculant du manuel à l’automatique, on réduira le surdosage : “J’ai un appareil qui gère ma piscine et qui utilise la juste quantité au bon moment.”
L’automatisme ce n’est pas simplement de l’information mais surtout la gestion automatique de l’eau d’une piscine avec un appareil qui teste l’eau en permanence, et qui, en fonction de l’information qu’il reçoit, lui aussi en permanence, injecte la dose nécessaire du bon produit, au bon moment et en bonne quantité. On parle alors de traitement raisonné de la piscine avec des appareils ayant une intelligence du traitement automatique.
Les gros progrès d’aujourd’hui portent sur les sondes. Une sonde sensible aux courants parasites est problématique dans une piscine. L’autre élément important est l’analyse des données relevées par ces sondes. C’est ce qui fait la différence entre les appareils.
Comment réduire l’empreinte écologique des piscines d’après-vous ?
Cela passe clairement par les automatismes et la notion de prévention afin d’éviter d’utiliser des produits chocs. Il faut faire preuve de pédagogie auprès des consommateurs afin qu’ils constatent avant d’agir. Un consommateur bien formé aura une piscine bien équilibrée s’il a les bons gestes. Et c’est grâce aux pisciniers que nous pourrons former les consommateurs à l’analyse de l’eau et installer des routines chez leur client. On a des soucis sur sa piscine quand on ne s’en est pas préoccupé auparavant. Ce n’est donc pas un problème de produit mais de formation à l’usage du robot, au nettoyage régulier de la ligne d’eau et du média filtrant… et à tout ce qui peut être fait pour ne pas trop polluer l’eau comme de ne pas laisser son chien aller dans la piscine.
Les pisciniers ont les moyens de le faire, après c’est une question de volonté, de priorisation et de formation des employés. Le piscinier qui a des employés bien formés a des clients qu’il sait garder. Ceux qui se projettent dans l’avenir en ont pris conscience et ont une forte demande de d’informations techniques de la part de leurs clients.
Chez Bayrol et depuis plus de 10 ans, nous avons fait le choix de ne pas réduire le nombre de nos commerciaux. Pour nous, ce sont des vecteurs de formation en plus d’avoir un rôle commercial en début d’année : ils parlent de technique, de business, de développement intelligent… Ils sont un relai d’information essentiel.
Nous travaillons également à une meilleure visibilité de nos messages par les clients, pour qu’ils soient vus et revus sous un angle et sous un autre dans toute l’Europe. Nous essayons pour cela de trouver les outils (tutoriels, newsletters, infographies…) qui vont nous permettre de faire comprendre ce problème à nos clients consommateurs et professionnels.