Accueil DécryptageLe coin des experts La lecture des notices : un réflexe indispensable !

La lecture des notices : un réflexe indispensable !

par laurence


Quel professionnel prend réellement le temps de (re)lire une notice avant de poser un nouveau liner, d’installer un volet, de raccorder une régulation de pH à un coffret électrique ou de paramétrer un électrolyseur ? La force de l’habitude nous concerne tous. Or, bien souvent, les experts constatent un défaut lié à une absence de lecture de la notice avec à la clé, un risque réel de dégradation ou de perte de garantie fabricant.
Avec Christel Ageorges, Manu Martinez et Benjamin Vié.

Le constat : « Beaucoup de professionnels agissent par automatisme et ne vérifient pas les notices »

Dans 80 % des expertises, les problèmes sont liés à la non-lecture d’une notice ou à la non-remise des documents d’utilisation au client. C’est comme quand on ne regarde pas la notice de montage Ikea. 

Le coin des Experts est une nouvelle rubrique de L’activité Piscine. Objectif : réduire vos risques de litiges à une époque où les clients sont davantage informés et prompts à déclencher une procédure à votre encontre, dès lors que vous n’auriez pas respecté une étape, une consigne ou une règle lors de vos interventions sur leur piscine.

Quelques exemples de situations :

Volet roulant dont le moteur est mort, alors qu’il était indiqué dans la notice qu’il fallait installer un boîtier de protection après le coffret électrique.
Liner ou coque qui change de couleur en raison d’un mauvais traitement ou de l’absence de pool-terre.
Électrolyseur low salt qui pose des problèmes parce que les professionnels ont versé une quantité de sel dans la piscine.
Couvercle du brominateur qui explose dans le local technique à sa remise en route au printemps parce qu’il n’avait pas été hiverné par le client.
Mais aussi appareils pas installés en bypass, sondes mises à la verticale, absence de protection électrique en tête de ligne…

Et ce ne sont là que quelques exemples de situations dont les conséquences peuvent s’avérer très graves. 

Les problématiques

Des notices et des normes pas lues : aujourd’hui ce qui se constate en expertise, c’est que les professionnels font comme ils ont toujours fait, raccordent par automatisme et ne vérifient jamais les notices. Et comme les installations n’ont pas été faites en respectant les consignes des fabricants, il n’y a pas de prise en garantie.

Des notices mal écrites, particulièrement sur la partie concernant les raccordements électriques, ce qui engendre des problèmes de sécurité et des inexactitudes techniques.
La notice peut indiquer, par exemple, de câbler un électrolyseur en le branchant sous le contacteur moteur. Si l’électrolyseur prend feu, l’expert conclura qu’il n’était pas protégé. Le fabricant sera incriminé parce que sa notice n’était pas assez précise.

Des notices qui n’ont pas été remises au client : on constate les mêmes problèmes avec le client final qui ne s’est pas vu remettre les documentations techniques alors qu’il s’agit d’une obligation légale. Si le procès-verbal de réception ne précise pas que le client a reçu ces documents en main propre, les avocats du client s’engouffreront dans la brèche.

Des réceptions de travaux ou d’interventions non formelles : peu de professionnels font des réceptions de chantier « propres », elles sont donc tacites. Le problème est que sans PV, il n’y a pas de réception. Or, à la réception d’un liner, par exemple, il y a une notice dans le carton qui précise les conditions de garantie du produit en fonction des températures de l’eau, de la chimie, de l’entretien. Ce document est quasiment prêt à l’emploi pour une réception de chantier en le faisant signer au client.

Ce qui prime : la notice ou la loi ?

C’est la loi. C’est pour ça que l’ARS, la sécurité, la C15-100, etc. sont obligatoires.
En cas d’expertise sur un problème avec un volet, l’expert vérifie en premier lieu si la notice technique a été respectée puis si la notice elle-même est conforme aux textes réglementaires. Si elle n’est pas conforme, c’est alors la loi ou la norme qui prime.

• Cas n°1 : si le piscinier a respecté la notice technique et qu’il l’a bien mise en application, il est à l’abri du litige et il ne perdra pas la confiance du client, ce qui est essentiel pour le piscinier. La responsabilité incombera au fabricant qui n’aura pas fourni les informations suffisantes (ou aura fait une erreur dans sa documentation) pour éviter les risques pour les personnes ou le matériel. 

• Cas n°2 : si le fabricant précise dans sa notice que l’installation doit être conforme à une norme, le piscinier doit s’assurer de la connaître et de l’appliquer, faute de quoi il pourra être mis en cause en cas de litige.

• Cas n°3 : En l’absence de précisions sur la notice, c’est le texte réglementaire qui s’applique. Dans l’ordre : DTU, DTP, accord AFNOR, norme, décret, loi.

« Si un piscinier veut avoir à sa disposition les 74 normes du métier, il devrait débourser près de 26 000 euros ». Le premier réflexe est donc déjà de commencer par bien lire les notices.

Et pour ceux parmi vous qui veulent pouvoir accéder aux textes normatifs, techniques et réglementaires en vigueur dans le bâtiment, sachez qu’il existe une solution avec l’abonnement à Le Reef sur le portail Batipédia du CSTB, pour 1 019 €/an.

Les pisciniers sont confrontés à deux contraintes fortes : le prix des documents normatifs et la difficulté de les comprendre en raison du vocabulaire technique utilisé. La seule façon de se prémunir est d’appliquer la notice du fabricant, qui lui, doit s’assurer que sa notice est conforme à la norme. Il doit aussi suivre des formations juridiques.

Une suspicion de désordre n’implique pas qu’il y a un désordre ou un défaut d’installation. Si le produit remplit sa fonction (ex : l’étanchéité pour une membrane PVC), un avocat ne peut pas demander la conformité à la norme en l’absence de désordre. Sauf si précisé dans un devis de « rénovation ».

La responsabilité des professionnels engagée ?

Dans un devis, si aucune référence à une norme n’est faite, le piscinier a une obligation de résultat. S’il précise que son intervention se fera conformément à la norme, il est obligé de la respecter. 

Dans tous les cas, si les règles d’installation, de maintenance et d’utilisation des fabricants ne sont pas suivies, leurs garanties seront annulées. Et c’est vous, pisciniers, qui en pâtiraient le plus en assurant la garantie et en remplaçant ou réparant à vos frais le moteur de volet, la pompe de filtration voire le revêtement !

Car c’est souvent sur l’étanchéité souple que la question des responsabilités se pose le plus. Il suffit d’une analyse au fabricant pour démontrer que l’équilibre de l’eau n’est pas bon et « faire sauter » les garanties. Il faut alors que le particulier ou son piscinier, avec lequel il a signé un contrat de maintenance, puisse faire la preuve que l’eau a été vérifiée régulièrement et que les paramètres étaient dans la norme ! Mais faute de PV de réception d’analyse de l’eau ou de carnet d’entretien à jour et signé par le client et son piscinier, ce sera particulièrement difficile à opposer à l’analyse du fabricant.

Les notices peuvent également comporter des erreurs ou ne pas être suffisamment détaillées. En matière de branchements électriques, tout doit être fait conformément à la norme C15-100 qui comporte 524 pages ! En cas de doute sur une notice, les professionnels (comme les fabricants) peuvent contacter un expert piscine de la CNEPS, par exemple, pour du conseil ou une relecture, avant de se retrouver autour d’un bassin avec le client, son avocat, le fabricant et… l’expert.

Le rôle des fournisseurs (fabricants et distributeurs) est important dans la réduction des litiges avec des clients. Tant parce qu’ils ont un devoir de conseil que parce que leurs produits doivent être posés dans de bonnes conditions sauf à voir leur image ternie, ils doivent s’assurer de :  

la bonne information du professionnel par leurs technico-commerciaux et la répétition d’un certain nombre de messages.
la formation technique régulière des pisciniers par leurs experts techniques à leurs nouveaux produits, leur installation, leur fonctionnement et leur maintenance.
la réponse rapide et précise de leur SAV.

Charge ensuite au piscinier de choisir chaque fournisseur sur sa capacité d’accompagnement plutôt que de se baser uniquement sur les prix et les marges qui lui seront accordées.

Et attention aux réflexes et aux habitudes. Les produits et les technologies évoluent. 

Pas de déduction par habitude, deux produits similaires de la même marque peuvent se brancher différemment.
Ne pas doser ou régler « à la louche » : calibrage d’un analyseur redox, taux de sel d’un électrolyseur, réglage d’un volet, etc.
En gestion de parc, il faut disposer des notices de chaque système installé dans chaque piscine.

LE CONSEIL DES EXPERTS

1. Lire et respecter les notices à chaque installation ou intervention dès que les produits sont différents. Cela ne règlera pas tous les problèmes, mais permettra d’en éviter une bonne partie.

2. S’assurer que la source du document ou de l’information est bien le fabricant.

3. Contacter le SAV de votre distributeur pour disposer de la bonne version de la notice.

4. Vérifier si la notice correspond bien au produit recherché et pas à un produit similaire.

5. Demander au fabricant d’expliciter la notice, si elle n’est pas suffisamment compréhensible, avec un retour écrit.

6. Lire les notices jusqu’au bout et surtout les petites lignes.

7. Transmettre les notices au client et les lui expliquer.

8. Noter sur le PV de réception que vous les lui avez transmises et expliquées.

9. Faire signer le PV de réception en double exemplaire pour conserver une trace écrite opposable en cas de litige.

10. Si vous travaillez avec des sous-traitants, assurez-vous qu’ils ont bien lu les notices. Vous êtes responsable de leur travail.

11. Suivre régulièrement des formations dans les centres (généralités) et fabricants (produits).

12. Se rapprocher des experts pour les notices avec des non-conformités.

Avec Christel Ageorges, expert en piscines et spas, traitement de l’eau et formatrice, Benjamin Vié, formateur et expert piscine, Manu Martinez, formateur et expert piscine

Texte : Sébastien Carensac

L’Activité PISCINE magazine, la référence de l’information professionnelle du secteur de la piscine et du spa.

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