Jérôme Bouilhac a la fibre entrepreneuriale et l’univers de la piscine répondait non seulement à son besoin
de créer de ses mains mais aussi à la multiplicité des compétences requises. L’idéal pour cet autodidacte.
Une formation in-situ
« À l’origine, je suis électronicien et mécanicien mais je m’y connais également en maçonnerie et en plomberie. J’aime tout ce qui est manuel et lorsqu’en 2003, j’ai intégré une petite entreprise familiale de construction de piscines, en Dordogne, je me suis immédiatement senti à ma place dans cet environnement. Pendant les 4 ans où j’ai été son employé, le dirigeant de cette société m’a fait passer par tous les postes et j’ai appris le métier in-situ. Les métiers en réalité car être piscinier c’est avoir des compétences dans des secteurs très variés et complémentaires les uns des autres.
En 2007, avec deux collègues, nous avons décidé de créer notre propre entreprise, que nous avons baptisée BLM Piscines. J’ai toujours voulu travailler à mon compte et je n’ai pas manqué l’occasion lorsqu’elle s’est présentée. Notre projet était un peu fou. Nous nous sommes installés dans un petit village de 160 habitants, dans une vieille grange, sans avoir un seul client sur notre carnet de commande. Mais le culot a fini par payer. Depuis 2010, je suis seul aux commandes de BLM Piscines. Mon entreprise se trouve maintenant à 300 m de la vieille grange de mes débuts, dans un bâtiment de 300 m2. »
Le choix de l’accompagnement
« Si BLM Piscines a vocation à assurer la construction et la rénovation de bassins mais aussi le SAV, nous avons fait le choix de nous concentrer sur la piscine béton haut de gamme. Nous réalisons environ 80 chantiers par an, dont la moitié en constructions neuves et sur tous types de modèles : miroir, en bord de falaise, dans une grotte. Nous sommes capables de livrer les projets les plus fous et les piscines les plus atypiques. C’est notre image de marque.
Parce qu’il est nécessaire, pour progresser, de savoir se remettre en question, nous avons fait appel à une société de management et à un cabinet conseil en communication, histoire de prendre de la hauteur, de créer une équipe très soudée au sein de BLM Piscines et de toucher une nouvelle clientèle. Aujourd’hui, l’entreprise compte 19 collaborateurs, tous très investis. Ils sont regroupés dans 3 pôles distincts : celui construction-rénovation, un second SAV et technique et le 3e, dédié à l’entretien et au magasin. Dans chacun d’eux, il y a une responsable qui travaille avec un binôme. En haute saison, chaque collaborateur intervient dans sa branche mais en basse saison, tous deviennent polyvalents. En contrepartie, tous sont employés à l’année et bénéficient de la sécurité d’un emploi stable dans une société qui a aujourd’hui plus de 20 ans d’existence.
BLM Piscines se trouve aux confins des départements de la Gironde, du Lot-et-Garonne et de la Dordogne, ce qui nous amène à intervenir dans un rayon d’une trentaine de kilomètres autour du 33, du 47 et du 24. Nous nous limitons à des temps de parcours d’une heure maximum pour garder la qualité actuelle de notre SAV. Car nos clients sont de plus en plus exigeants et tiennent à nous voir arriver dans un délai très rapide après leur appel. »
Un marché tendu
« En 2023, nous avons réalisé une très belle saison ; nous avons même dépassé la barre des 3000 clients cumulés. 80% d’entre eux sont des étrangers propriétaires de belles maisons avec piscines dont ils profitent pendant les vacances d’été. Ils ont les budgets pour s’offrir des réalisations de qualité.
Nous n’avons pas été trop impactés non plus par les pénuries d’eau ni par les règles d’urbanisme et les formalités administratives relatives à la construction de piscines neuves.
Cette année, par contre, je suis davantage circonspect. Certes nous avons beaucoup de demandes et de beaux projets en perspective mais les devis restent en attente. Je n’avais jamais vécu une telle situation jusqu’à aujourd’hui. Il faut dire que depuis le 15 octobre, la région est frappée par des pluies incessantes, ce qui n’incite pas à penser à la construction de sa piscine. A cela s’ajoutent une semi-déflation et une période marquée par des élections.
Le tout fait que les clients hésitent et adoptent une attitude attentiste. Mais je garde néanmoins espoir ! Il faut juste arriver à gérer les approvisionnements et le stock ; ce qui s’avère compliqué quand on n’a pas une vision dégagée de l’avenir. Heureusement, nous travaillons sur des chantiers de rénovation et nous assurons le SAV de la quasi-totalité de nos clients. »
Les enjeux futurs
« Pour pérenniser une entreprise, il faut prévoir et se tourner vers l’avenir. Les enjeux sont multiples. En interne d’abord, il faut réussir à garder une cohésion dans les équipes, à motiver les troupes. Je reste très attaché au bien-être au travail. Nos clients se montrent toujours plus exigeants, ce qui impacte directement le travail des collaborateurs.
Il faut donc expliquer à ces clients, via une communication efficace, que le piscinier est en premier lieu un être humain et ensuite un artisan. Construire une piscine, c’est d’abord avoir une véritable réflexion sur le projet, établir ensuite des plans puis engager les travaux. Nous sommes dans des zones dont la plupart dépend des Bâtiments de France, donc chaque projet est soumis à leur approbation, ce qui allonge les délais de deux mois. Nous sommes également tributaires des approvisionnements et de la météo.
En 20 ans, les mentalités ont changé, nous sommes dans le monde de l’immédiateté. La grande majorité des personnes a perdu la notion du travail manuel et du temps qui s’y rattache. BLM Piscines est affiliée à la Fédération des Professionnels de la Piscine depuis 2003 et j’espère que nous aurons des discussions constructives sur ce sujet.
Nous travaillons un peu comme des équilibristes, à la merci d’impondérables qui nous impactent directement mais dont nous ne sommes pas responsables.
Aujourd’hui, nous devons expliquer à certains clients que le soleil ne s’achète pas, qu’il va falloir, à l’avenir, penser à économiser l’eau. Nous essayons de les sensibiliser à cet enjeu de l’eau en les incitant à prévoir des récupérateurs, à investir dans des pompes plus coûteuses mais moins gourmandes en énergie. Nous les accompagnons dans une prise de conscience qui devient inévitable et nous leurs proposons des solutions.
Dans le même temps, le métier de piscinier nous permet aussi de rencontrer des personnes venant d’horizons différents, de différents pays et tous viennent à nous avec leurs histoires. La piscine reste un investissement-plaisir, créatrice de convivialité et de moments de partage et nous voyageons grâce à nos clients. »
Propos recueillis par Cécile Olivéro