En quelques années seulement, BWT s’est fait un nom sur le marché de la piscine. Acquisitions d’acteurs historiques, développement d’une marque forte, engagements environnementaux, innovations… qui est ce spécialiste européen du traitement de l’eau et jusqu’où compte-t-il aller ?
Entretien avec Naty Lopez, Responsable de la division piscine BWT.
LAP : Aux origines de BWT…
« La belle histoire de BWT a commencé avec la création de Benckiser Wasser Technik en 1823, il y a 200 ans. En 1990, Andreas Weißenbacher, à l’époque directeur de l’entreprise, la rachète à la famille fondatrice et la renomme Best Water Technology, avec la volonté de développer l’activité autour du traitement de l’eau. Acquisitions après acquisitions, le groupe a élargi son activité jusqu’à devenir l’un des leaders européens du traitement de l’eau avec plus de 6 000 salariés.
Les trois premiers marchés de BWT sont la pharmacie (production d’eau très pure pour la fabrication de traitements médicaux), l’industrie et le résidentiel (traitement et adoucissement, fontaines, etc.), et la production d’énergie verte avec des piles d’hydrogène à partir de l’eau.
Andreas Weißenbacher est quelqu’un d’extraordinaire. Il se sent responsable de l’avenir des générations futures et tout particulièrement de celui de sa fille. C’est en constatant qu’il y avait une forme d’inertie dans le traitement de l’eau des piscines qu’il a décidé d’élargir l’activité de BWT à ce secteur pour y apporter de l’innovation et en réduire les consommations. Il a donc commencé à investir le marché de la piscine avec le rachat de Procopi en 2017. S’en sont suivies d’autres acquisitions, dont celles d’Aquatron en 2019 et de Kokido en 2021. Ces acquisitions majeures nous ont permis de disposer de l’outil industriel nécessaire pour développer des produits d’avenir. »
Quelles sont les spécificités de BWT ?
« Notre ADN, notre connaissance des besoins des consommateurs, du traitement de l’eau et de la chimie nous obligent à penser « out of the box » (ndlr : « sortir du cadre pour penser différemment, avoir une autre approche ») et à réfléchir aux raisons pour lesquelles nous faisons les choses. Cette politique d’amélioration, nous l’appliquons à la piscine. Par exemple, quelles sont les conséquences de la perte de charge et quelles technologies permettent de corriger le problème pour réduire les consommations d’eau, d’énergie et de produits. Cela a abouti au lancement de nouveaux produits en phase avec cette sensibilité qui se développe aujourd’hui chez les pisciniers.
Nous avons commencé avec les pompes à chaleur en proposant des modèles moins énergivores, et avec des robots plus efficaces pour soulager le filtre et la pompe et donc réduire leurs consommations.
Les consommateurs ne sont pas conscients de l’importance du bon dimensionnement de la filtration. Ils ne le sont pas plus de celle de la qualité des lames de couvertures automatiques surtout quand la piscine est équipée d’une PAC. Il est donc essentiel de diffuser le bon message vers le consommateur afin qu’il comprenne, par exemple, l’importance des lames dans l’isolation et la conservation de la chaleur de l’eau du bassin. Nous avons ainsi pris l’engagement, comme pour nos marchés de l’eau potable et de la pharmacie, de former et d’accompagner les consommateurs, en nous appuyant sur notre notoriété et notre réputation technique.
Un autre de nos sujets phares est le sourcing. Comme nous voulons être éco-responsables, nous nous organisons pour fabriquer nos produits localement en nous appuyant sur les compétences globales du groupe BWT. C’est toute la force d’une multinationale. Nous venons, par exemple, de lancer une ligne de fabrication de robots électriques en France qui bénéficie du savoir-faire d’Aquatron. Il est de notre responsabilité de réduire la distance entre le producteur et le consommateur en limitant le recours aux bateaux et aux avions. Ce qui est arrivé ces dernières années a été terrible avec les difficultés d’approvisionnement, l’explosion du prix des containers, le manque de disponibilité des bateaux, etc. Résultat, les clients sont davantage sensibles à l’origine du produit et à son empreinte carbone (fabrication, transport…) alors qu’il y a peu, personne en France ne savait ce que c’était. Et nous nous challengeons pour l’abaisser.
Nous constatons également un véritable changement de mentalité chez les pisciniers. Ils sont pragmatiques et ne parlent pas que de prix. Nous devons continuer à les sensibiliser et à les former pour qu’ils transmettent le message à leurs clients. Nous avons encore beaucoup de sujets à traiter avec des problématiques qui nous poussent à réfléchir à l’avenir. »
BWT et l’environnement ?
« Let’s change the world, sip by sip (ndlr: “Changeons le monde, gorgée après gorgée”)» est le message fort qui soutient toutes nos réflexions et nos actions. Pour nous, il est possible de changer le monde par de petites actions.
Chez BWT, nous tendons vers le zéro papier dans le cadre de nos engagements RSE. Jusqu’à peu, nous envoyions des milliers de factures chaque mois, avec une machine dédiée à la mise sous enveloppe. Ce n’est plus possible aujourd’hui. Covoiturage pour les déplacements, utilisation de filtres pour une eau potable plus pure, de fontaines pour éviter l’achat de bouteilles plastiques… nous sensibilisons et éduquons nos équipes en France et en Autriche. L’engagement des collaborateurs et de nos clients est essentiel et nous y travaillons chaque jour.
Nous sommes particulièrement sensibles au problème des microplastiques que l’on retrouve partout et à la question des près de 500 milliards de bouteilles en plastique vendues chaque année dans le monde. C’est pour lutter contre ce fléau que nous avons lancé le mouvement Bottle Free Zone. Nous incitons les consommateurs et les professionnels de nos différents marchés à mettre en place, chez eux et dans leurs entreprises, des fontaines pour réduire l’utilisation de bouteilles en plastique. Dans la piscine, nous venons de signer un partenariat avec le réseau L’esprit piscine qui s’engage à ne plus avoir de bouteilles dans ses magasins et va mettre à la disposition de ses collaborateurs et de ses clients des fontaines d’eau plate ou pétillante avec des gourdes à remplir porteuses du message « Change the world ».
Nous abordons différemment les questions des plastiques de consommation et de long terme. Pour les premiers, dans le cadre de notre projet RSE, nous avons mis en place un comité de pilotage, qui, dans chaque usine, à l’instar de la qualité et de la sécurité, contrôle les quantités de scotch utilisées, le type de rembourrage des cartons d’emballage, etc. En ce qui concerne les plastiques de long terme, nous commençons à récupérer les anciens liners, membranes et lames de volets, pour les faire recycler. Cela représente un coût, mais nous préférons le voir comme un investissement pour l’avenir. Cela nous permet d’ailleurs de commencer à imaginer la chimie du plastique de demain avec un plastique plus éco-responsable. »
Comment accompagnez-vous vos clients professionnels au quotidien ?
« La formation est très importante pour nous. Nous organisons des journées professionnelles dans nos 13 agences BWT/Procopi en France, les Best Water Days, lors desquelles nous mettons en avant nos nouveaux produits en faveur de l’environnement.
Depuis le rachat de Procopi par BWT, nous sommes « focusés » sur le service. Nous avons lancé un programme de rénovation et de renforcement de ces agences avec comme objectif de les remettre au goût du jour : réaménagement de l’accueil avec un décor bois et naturel, service de click-and-collect… L’application Procoshop a aussi été conçue pour accompagner nos clients au quotidien : deviseur pour piscine privée, qui détermine précisément l’ensemble des équipements nécessaires en fonction de la taille du bassin, configurateur pour les pompes à chaleur… mais aussi commande en direct, suivi des livraisons, historique des factures, etc.
Nous nous appuyons sur nos réseaux de techniciens itinérants BWT pour proposer un large catalogue service à nos clients pisciniers avec de l’accompagnement à la pose, ou à l’étalonnage d’une régulation par exemple. Nous proposons également un service de dépannage à domicile gratuit pour les consommateurs propriétaires d’un robot de certaines gammes, dans le prolongement de ce que nous faisons déjà pour nos adoucisseurs. Les équipes sont déjà en place. En France, nous avons des techniciens qui tournent en permanence. Cela rassure les clients sur la qualité de nos produits et confirme nos engagements. »
Quel est le rôle de la marque BWT dans votre stratégie ?
« Nos enquêtes prouvent qu’investir dans la construction d’une marque réputée génère des retombées. Cela fonctionne très bien pour le marché du traitement de l’eau. Le rose commence également à nous faire connaître sur le marché de la piscine. Nous apportons un message plus frais et affichons notre volonté de nous différencier de nos concurrents.
En revanche, l’enjeu, lorsqu’on est une marque réputée avec une image de qualité autrichienne, c’est que nous devons être à la hauteur des attentes du client. Nous avons donc des chantiers importants. Après le rachat de Procopi, par exemple, nous avons upgradé les contrôles qualité, ce dont les clients nous sont reconnaissants.
Autre axe de travail important, la maîtrise de nos fabrications. Aujourd’hui, nous fabriquons pratiquement tout. Nous avons modifié l’ADN « un peu trop gris » et la culture d’entreprise de chaque société, sans l’imposer, et fait évoluer leur management. Nous sommes respectueux de l’histoire de chacune et de leur fonctionnement.
L’un de nos défis a été de réunir l’ensemble de nos ingénieurs R&D pour échanger sur l’eau en général et faire émerger de nouvelles idées, trouver des solutions pour la réparabilité de nos produits ou résoudre des problématiques énergétiques pour nous adapter aux attentes environnementales. Nous avons réussi à créer une dynamique dont nous sommes très satisfaits.
Et nous poursuivons l’élargissement de notre portefeuille de marques. »
Comment voyez-vous le marché de la piscine évoluer en 2023 ?
« Nous sommes conscients que nous sortons d’une période anormale et que nous devons comparer la situation actuelle à celle de 2019. Le besoin de bien-être et de loisirs sont des réalités, et nous savons que nous avons un parc de piscines important à gérer.
Nous devons donc accompagner nos clients, les aider à vendre, à faire des préconisations, et les former pour qu’ils développent leur expertise et contribuent à l’amélioration de notre profession. Il est également important de faire preuve de davantage de proactivité, de profiter des périodes positives pour bien préparer l’avenir. Et, dans des périodes plus compliquées, où la piscine sera peut-être moins démocratique, ne pas hésiter à aller se battre en exploitant bien son fichier client.
Il faut rester optimistes, c’est bon pour la santé (sourire), et parler en rose en 2023 ! ».
Propos recueillis par Sébastien Carensac