Les droits d’auteur

par laurence

Quoi de plus naturel que de penser qu’une photo qui figure en bonne place dans des revues ou documents accessibles à tous peut être reproduite sans limite ? C’est sans compter sur le droit qui ne l’entend pas de la sorte.
Voilà un sujet très sensible qui met régulièrement dans l’embarras des personnes de bonne foi. En effet, il semble évident d’imaginer puiser dans des magazines ou des banques d’images des illustrations mainte fois étalées à la une de journaux ou de dépliants commerciaux. Une erreur à ne pas commettre, car en matière de photographie, seul le photographe est juge de la destination que peuvent prendre ses clichés. Et ce n’est pas parce qu’on les retrouve dans plusieurs supports qu’ils sont “libres de droits‿.

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Toujours se rapprocher de l’auteur du cliché

« La notion de photo libre de droit n’existe pas en droit français », prévient Me Joëlle Verbrugge, avocate au barreau de Bayonne, auteure du blog “Droit & Photographie‿ (www.droit-et-photographie.com). Le droit part du principe que tout cliché a un auteur qui est celui qui l’a produit. En conséquence, il appartient au photographe de décider qui peut se servir de ses photos. « C’est lui qui décide s’il souhaite céder ou pas sa photographie, à qui et sous quelles conditions. Et ce même si la photographie réalisée lui a été commandée par un magazine ou une entreprise de communication », explique l’avocate. Autant d’éléments qui seront définis et écrits dans un contrat de cession qui doit remplir certains critères pour être valable juridiquement. En effet, le Code de la propriété intellectuelle impose un formalisme bien précis sur le contenu de tels contrats.

Ainsi l’article L. 131-3 dispose que « la transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée ». Plus concrètement, cela signifie que les droits cédés peuvent l’être pour un support bien précis ou pour un usage déterminé et qu’il est impératif de prévoir de quand à quand s’applique cette cession. « De nombreux contrats prévoient une cession de droit dans laquelle tous les modes d’exploitations, tous les supports des droits cédés ad vitam æternam, pour le monde entier sont envisagés. Ces contrats léonins ne sont pas conformes au CPI. En effet, ils ne définissent pas clairement le nombre d’exemplaires de la publication ou d’affichages et ne délimitent ni la durée, ni le territoire, ni la destination de l’exploitation », estime-t-on à l’Union des photographes professionnels et auteurs. In fine, non seulement il est fortement conseillé de ne jamais piocher çà et là des clichés publiés sur supports papier ou numérique, mais il n’est pas plus sérieux de s’arranger discrètement avec le propriétaire du support sur laquelle on a repéré l’image.

Des peines sévères

Celui qui aura fait usage de la photo sans en avoir obtenu le droit auprès du photographe s’expose à des poursuites au pénal. Mais en plus, celui qui les a transmises peut quant à lui devoir répondre à la justice pour contrefaçon. « Une personne utilisant une image sans en avoir obtenu l’autorisation de la part de son auteur peut être lourdement condamnée pour contrefaçon et voir de surcroît cette condamnation inscrite sur son casier judiciaire, puisqu’il s’agit d’une condamnation pénale », prévient Me Joëlle Verbrugge. Des amendes sont également prononcées en marge des condamnations pénales. Le mis en cause (l’utilisateur de la photo) peut ne pas être le seul à se retrouver devant les juges. En effet, il peut se retourner contre celui qui lui a fourni la photo.

La prudence est donc de mise, spécialement avec l’avènement des nouvelles technologies. Même si une photo est mise en ligne par son propriétaire sur des sites accessibles à tous, l’auteur du cliché est en droit d’assigner en justice celui qui a utilisé cette photo sans le lui demander. Bien évidemment, si le cliché a été utilisé à des fins commerciales, les sanctions financières risquent d’être plus lourdes. « Pour être en règle, il est indispensable de se rapprocher de l’auteur de la photographie afin de négocier directement avec lui les conditions dans lesquelles vous pourrez éventuellement vous servir d’une image », conseille l’avocate. Et ce même si la photographie est réputée être libre de droit. Ainsi, vous pourrez établir un contrat de cession de droit qui est une autorisation écrite donnée par l’auteur d’exploiter son œuvre dans des conditions déterminées. Reste une solution moins risquée, les banques d’images, même si parfois certaines prévoient des conditions d’utilisation restrictives. Là, ce sont donc les conditions générales de vente qu’il conviendra de lire attentivement avant de cliquer. Autant dire qu’il faut s’armer de prudence avant d’illustrer un document avec une photographie pour laquelle on ne détient pas les droits.
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Le droit à l’image

En marge des droits d’auteurs, l’utilisation de photographies est également régie par le droit à l’image. Autrement dit, si la photographie comporte des biens et a fortiori des personnes, le propriétaire desdits biens peut s’opposer à sa diffusion sans son accord préalable. « Le propriétaire d’un bien ne peut s’opposer à la diffusion de l’image de ce bien que si cette diffusion lui procure un trouble anormal », rappelle Me Joëlle Verbrugge. Il appartient dans ce cas au propriétaire d’évaluer ce préjudice et de le démontrer. En cas de présence d’une personne sur la photographie incriminée, la notion de préjudice ne tiendra que si cette personne est formellement reconnaissable. Dans ce cas, il sera alors indispensable d’obtenir son consentement pour diffuser le cliché. Comme pour les droits d’auteurs, les contrevenants à ces règles s’exposent à des sanctions pénales et au paiement de dommages et intérêts.

En pratique !

Comme souvent, les décalages entre le texte et la pratique ne manquent pas en matière de droit d’auteurs. Ainsi, une majorité de photographes professionnels acceptent de s’écarter de la stricte interprétation des textes si l’on reconnaît la qualité de leur travail et surtout s’ils sont consultés avant qu’une de leur photographie ne soit reprise. « Si je repère une de mes photos utilisée dans un support sans en être informé, je fais immédiatement constater par voie d’huissier », explique Frédéric Blanpain, photographe professionnel.

« Si certaines personnes se servent d’une de mes images à des fins commerciales sans me l’avoir demandé, je suis relativement intransigeant. En effet, s’ils utilisent nos images pour gagner leur vie, il n’y a pas de raison que nous aussi nous ne la gagnions pas », abonde Fabien Delairon, lui aussi photographe professionnel. Reste que la plupart du temps, les photographes acceptent volontiers de céder une image pour une somme modique, voire gracieusement si l’on prend soin de se rapprocher d’eux. En revanche, ils sont relativement intraitables sur la signature des clichés. Une habitude qui se perd et qui permet pourtant de donner à leur auteur la reconnaissance qu’il mérite.

Pour aller plus loin…

Le blog “Droit & Photographie‿
www.droit-et-photographie.com

Le site de l’Union des photographes professionnels et auteurs
www.upp-auteurs.fr

L’Activité PISCINE magazine, la référence de l’information professionnelle du secteur de la piscine et du spa.

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