L’offre globale

par laurence

Les attentes des consommateurs en matière de piscine sont de plus en plus larges. Pour le piscinier, proposer une offre globale revient à se positionner comme un interlocuteur unique en mesure d’apporter une réponse à toutes ces attentes.
Texte : Benoît Viallon

Qu’elle soit externalisée ou assurée en interne, cette approche encore marginale chez les pisciniers peut-elle aujourd’hui être laissée de côté ?

Que recouvre une offre globale ?

Depuis plusieurs saisons, il semble que le client particulier soit devenu de plus en plus sensible à la notion d’intégration visuelle de son bassin. Le constat est partagé de manière unanime par tous les participants de cette table ronde : l’offre globale passe par le travail paysager et l’aménagement des abords qui sont devenus des incontournables d’un projet piscine. Joëlle Pulinx, déléguée générale de la FPP (Fédération des professionnels de la piscine), met également en exergue un autre aspect que peut revêtir l’offre globale : l’entretien du bassin. « Les attentes du grand public portent sur une piscine qui doit être de plus en plus équipée, confortable et automatisée pour en diminuer les contraintes de fonctionnement. Dans l’esprit du consommateur, l’offre globale, c’est en réalité une piscine sans souci. Concrètement, il recherche par exemple une année de SAV pour la gestion de son nouveau bassin. » Stéphane Goulet associe ainsi à l’offre globale l’image d’un double croisement, à la fois temporel et thématique. Le coordinateur du groupement L’esprit piscine introduit également la notion de coût dans la définition de l’offre globale. « Il s’agit de projets dans lesquels le client ne dissocie pas le bassin de son environnement. Créer un lien entre les deux implique forcément une enveloppe élevée. La barrière minimale, c’est 50 000 €. En deçà, il me semble compliqué de pouvoir parler d’offre globale. Dans les faits, les budgets avoisinent fréquemment les 100 000 €. »

L’origine de la tendance

L’influence médiatique

Noémi Petit insiste sur l’importance de la chaîne médiatique en amont du processus décisionnel. La directrice des salons Piscine Open et Paysalia pour le groupe GL Events rappelle ainsi le développement du style de vie dans les campagnes publicitaires et les nouvelles approches marketing. « Cette prégnance médiatique génère actuellement une réelle appétence du grand public le jardin et la maison. » Jérôme de Mauroy, directeur marketing et communication du groupe Fabemi et représentant du GIE Pierre reconstituée de France abonde en ce sens : « Les attentes ont clairement évolué et avec elles notre manière de communiquer. Nos produits ne sont plus présentés de manière brute mais en situation. Les nouveaux supports de communication les valorisent ainsi par le biais de mises en scène paysagées. »

L’intérieur des maisons est déjà agencé avec soin car cela fait longtemps que la décoration intérieure est bien ancrée dans les mœurs. À présent, la tendance est donc de se projeter véritablement dehors. « L’outdoor s’est énormément développé ces dernières années, reprend Noémi Petit. Le particulier s’imagine désormais très facilement dehors pour profiter de son extérieur toute l’année. Été comme hiver, les supports à la convivialité se multiplient : une piscine, une cheminée, une cuisine ou du mobilier sont autant de points d’ancrage autour desquels on souhaite partager un agréable moment en famille ou entre amis. Qu’ils soient professionnels ou grand public, les salons permettent de véritablement appréhender cette synergie qui se met progressivement en place. »

Les réformes de l’urbanisme

Adoptée le 13 décembre 2000, la loi SRU relative à la solidarité et au renouvellement urbain a profondément modifié les pratiques en matière d’urbanisme. Ce texte marque un véritable tournant dans la gestion des sols en mettant l’accent sur la lutte contre le mitage des territoires. Depuis lors, tous les documents d’aménagement (Plan local d’urbanisme, Schéma de cohérence territoriale et Directive territoriale d’aménagement) font la chasse aux espaces laissés vides en imposant une politique de densification des noyaux urbains. Pierre Giguet, gérant de l’entreprise Aloha Piscine, regrette cette nouvelle approche « qui entraîne invariablement une baisse de la superficie des terrains ». Cette réduction des surfaces accroît la proximité entre l’habitation et la piscine. Il n’est plus envisageable de placer le bassin au fond du terrain et de l’oublier une partie de l’année. Désormais, il est en lien direct avec la maison. D’où l’attention qui est portée sur son intégration paysagère : la piscine, visible en permanence, doit s’intégrer harmonieusement à son environnement avec lequel elle est en prise directe. « Pourtant, nous sommes toujours soumis à la règle des retraits minima par rapport aux limites de propriété, déplore Pierre Giguet. Cela pose de nombreux problèmes en termes d’intégration des bassins. La prise en compte de toutes ces contraintes réglementaires est très difficile. »

Plus petits, les terrains accueillent logiquement des bassins de taille réduite. « L’avenir passe donc peut-être par la mini-piscine, analyse Philippe Guillot, gérant de l’entreprise Aquasun/Pépi-Vert. Ces bassins aux dimensions raisonnables se révèlent très équipés et s’intègrent parfaitement dans des prestations haut-de-gamme. L’intérêt des installations de ce type réside dans le fait qu’elles ne requièrent pas de déclaration de travaux ni d’autorisation préalable. » Attention cependant, « être dispensé de déclaration, dans le cas des piscines inférieures à 10 m², n’exonère en aucun cas de respecter la réglementation en vigueur », alerte Joëlle Pulinx. Il y a donc toujours des prescriptions que le projet doit respecter, qu’elles soient fixées par un règlement de lotissement, un PLU, un ancien Plan d’occupation des sols ou le Règlement national d’urbanisme.

Qu’attendent les particuliers de leur piscine ?

Un placement pour l’avenir

Avec l’arrivée de la crise économique, les ménages français ont profondément modifié leurs comportements de consommation et d’épargne. « Il est clair que depuis 2008, les ménages investissent différemment, souligne Philippe Guillot. Plutôt que de risquer des placements en bourse, les particuliers préfèrent désormais investir dans une piscine pour apporter une valeur ajoutée à leur propriété. » Investir est donc un concept clé que le piscinier doit garder à l’esprit quand il est sollicité pour une prestation globale. Il s’adresse alors à un client au fort pouvoir d’achat, concevant la piscine comme un placement financier qui se doit de fructifier en générant un retour sur investissement futur. « Notre cœur de marché se compose désormais principalement de grosses, voire très grosses réalisations » constate ce piscinier implanté dans la vallée du Rhône depuis plus de 30 ans. Serge Renard, concessionnaire Carré Bleu, rejoint cette analyse : « Ces dernières saisons, le budget moyen pour un projet piscine a fortement augmenté. »

Un équipement intégré et sans difficulté

La FPP a commandité auprès de l’institut Médiascopie un ambitieux travail pour analyser les attentes et les perceptions des consommateurs à l’égard de la piscine. Cette étude, « Les Mots de la piscine », met ainsi en lumière l’image que renvoie la piscine : pour le grand public, c’est un élément de décoration du jardin permettant de conjuguer sport, bien-être et convivialité. Véritable nouvelle pièce à vivre, la piscine est désormais indissociable du jardin et, dans une moindre mesure, de la maison. « Alors qu’initialement, je ne traitais que des projets pour des promoteurs, depuis 2009 je traite exclusivement des dossiers pour des particuliers, remarque Sandrine Ligonnet, dirigeante du cabinet Idésia Outdoor. Faire appel à un architecte pour aménager son extérieur et son jardin est un concept relativement récent. Cela répond à la volonté de créer un espace personnel qui puisse valoriser sa maison. Cette démarche commence juste à entrer dans les mœurs, la tendance ne peut être que portée vers le développement. »

« Le particulier souhaite que sa piscine soit à la fois esthétique et facile, relève Jérôme de Mauroy. Il souhaite qu’un seul interlocuteur puisse assurer du début à la fin la gestion de son bassin. En définitive, il recherche une solution clé en main. » Cette quête du graal professionnel est une réalité que reconnaît volontiers Philippe Guillot : « Cela fait plus de 10 ans que je constate que le client se rassure à partir du moment où il n’a qu’un seul et unique intervenant comme interlocuteur. »

Faire face à ces nouvelles demandes

Prendre le temps de l’écoute

Pour Stéphane Goulet, une offre globale repose avant tout sur une étude attentive des desiderata, formulés ou non, du client. « L’écoute est importante. L’offre globale s’appuie en partie sur la disparition du distinguo entre l’intérieur et l’extérieur de l’habitation. Pour y parvenir, une réflexion sur le long terme est incontournable.»

La relation qu’entretient le client avec le bureau d’études durant le processus de vente s’avère donc déterminante. « Savoir écouter est tout simplement fondamental ! », rappelle le coordinateur du groupement L’esprit piscine. « Il est encore trop fréquent qu’un prospect mettant l’accent sur l’intégration de son bassin soit confronté à un interlocuteur qui ne porte qu’un discours technique. On peut faire l’analogie avec la voiture : personne ne regarde dans le moteur car on sait qu’il fonctionne. Toute l’attention est portée sur le confort et l’aspect du véhicule. » La partie technique est incontournable, il incombe au piscinier de la maîtriser parfaitement. Mais il convient de reléguer cet aspect au second plan face à un client qui n’y accorde pas forcément beaucoup d’importance. Il faut être capable de lui tenir un discours global intégrateur en l’emmenant notamment voir des réalisations pour qu’il puisse appréhender concrètement le travail paysager autour d’un bassin. Pierre Giguet nuance quelque peu ce constat. « Effectivement, le piscinier axe son argumentaire beaucoup moins sur la technique que sur le rêve. Mais attention ! Il convient malgré tout de bien définir techniquement l’équipement et la configuration du bassin dans le devis. » Il faut conserver une dimension concrète dans son approche, quitte à ce qu’elle n’arrive qu’à la fin du premier rendez-vous. C’est un moyen de rassurer le client mais également de limiter les incompréhensions et les conflits potentiels.

La genèse d’un projet global peut s’avérer dans les faits extrêmement longue. D’où l’importance de cerner rapidement la capacité financière du prospect. « Il faut être en phase avec les attentes du client, mais aussi avec son budget. Sinon, la vente ne se concrétise pas et le professionnel aura perdu son temps. »

Un accueil irréprochable et un showroom qualitatif

Pour proposer une offre complète, il faut une réelle qualité de service et d’accueil mais aussi un showroom de qualité afin que le prospect puisse se projeter et imaginer son bassin. Serge Renard, gérant de l’entreprise Côté Jardin, détaille ainsi son processus de vente : « Le premier rendez-vous a lieu chez les particuliers, c’est l’occasion d’écouter leurs idées sur leur projet. Le deuxième rendez-vous s’effectue, lui, dans le magasin où l’on laisse le prospect visiter le showroom. C’est l’occasion de valoriser notre savoir-faire : nous lui montrons ainsi ce que nous sommes capables de réaliser et la qualité de nos prestations. »

Moduler la réponse faite au client

Il peut être effrayant de proposer dès le premier contact une offre globale. Il convient donc de faire attention à ne pas présenter directement ce concept. Pour Serge Renard, « Il faut laisser venir le client, qu’il évolue doucement dans son projet. Il est ainsi tout à fait possible de vendre une piscine sans jardin ou de réaliser l’aménagement d’un jardin sans piscine. » Coralie Giguet, de l’entreprise Aloha Piscine, poursuit cette même logique. « Il ne faut pas occulter le fait que l’intégration paysagère peut poser un problème de budget pour nombre de particuliers. Il est possible de s’entendre dire qu’il ne faut pas réaliser de suite les abords pour pouvoir rentrer dans le budget imparti initialement par le client. »

À ce sujet, Joëlle Pulinx attire l’attention des autres participants sur le coût de création, mais aussi d’entretien, que représentent les abords d’une piscine. « Dans les faits, il est possible que le prospect se cantonne souvent à la réalisation de la plage et n’entreprend pas celle des abords globaux du bassin, faute de moyens. Il convient de rappeler que la clientèle piscine est assez équilibrée entre les CSP+ d’une part et les ouvriers/retraités d’autre part. »

Si l’envie, ou le besoin, d’un aménagement global est tout de même présent, il peut malgré tout se matérialiser dans les quelques saisons à venir. « Il est tout à fait possible de différer les opérations en échelonnant les étapes », valide ainsi Serge Renard. Cette répartition temporelle permet d’étaler les dépenses. « Il y a donc de la place pour des clients aux moyens plus modestes, précise Stéphane Goulet. Le piscinier peut toujours graduer sa réponse, et donc son chiffrage. Mais dans les faits, il y a toujours un minimum d’intégration : la prestation englobe systématiquement la plage et les abords. Ensuite, de petites prestations annexes peuvent venir se greffer. »

Assurer une réalisation et un suivi impeccables

De l’aveu même de tous les participants, la réalisation d’une piscine ne peut souffrir aucune approximation. « Il y a véritablement une obligation de résultat. N’oublions pas que nous sommes sur un marché de luxe. » La notion de service s’avère également indissociable de celle d’offre globale ou de projet global.

« Plus on propose de choses dans le projet, plus grande est l’attente que l’on suscite ». Le client visé est un client haut-de-gamme au fort pouvoir d’achat. Il paie des honoraires pour une prestation dont il attend que le prix soit justifié. De la conception du bassin à son entretien, le professionnel se doit ainsi d’être irréprochable dans l’accompagnement et le suivi de son client.

Une élément de différenciation

Valoriser son professionnalisme

Tous les participants s’accordent à dire que le métier de piscinier rassemble de multiples compétences. « Notre activité ne se résume pas à la mise en eau d’un bassin ! Nous amenons une réelle plus-value en intervenant très en amont du projet, avec un champ d’intervention extrêmement large. »

Le piscinier-paysagiste est capable d’intégrer un bassin dans un terrain d’ores et déjà travaillé, sans l’impacter. Il est même en mesure de déplacer un arbre ! Ce savoir-faire est un réel plus qui permet de rassurer le client. Il sait que son terrain sera rendu dans un état parfait et que la construction du bassin, bien qu’invasive, ne sera pas destructrice.

Pierre Giguet est partisan d’un positionnement sans concession : « Je ne souhaite pas que le client formule clairement ce qu’il attend. Après avoir échangé, je lui présente un projet tel que je l’imagine. Le parti pris est parfois complètement opposé à ce qu’il imaginait. C’est ce qui permet de valoriser mon expertise et mon savoir-faire. » En surprenant ainsi son prospect, le piscinier répond à ses attentes réelles sans être influencé par des idées préconçues. « C’est à ce titre que nos compétences de pisciniers sont perçues par le particulier. »

Asseoir son avantage concurrentiel et sa réputation

L’aménagement et l’animation d’un showroom se révèlent très coûteux pour un piscinier, notamment à cause des budgets de communication engagés. Mais la renommée que génèrent des réalisations qualitatives ne coûte rien. Malgré l’absence de dépenses, le drainage de chalandise se révèle pourtant conséquent, nombre de pisciniers se déclarant contactés uniquement par du bouche-à-oreille et des recommandations. Dans ce cas, le professionnel se doit d’apporter à chaque fois une réelle plus-value aux clients pour justifier sa réputation. « Nous devons nous démarquer pour nous différencier de la concurrence, avance Pierre Giguet. Automatiquement, nous proposons une intégration de la piscine. » La compétence du professionnel se concrétise par une réflexion sur l’implantation et la typologie du bassin pour répondre aux spécificités du terrain, aux attentes du client et aux différentes caractéristiques du projet. Cette vision est partagée par Philippe Guillot : « Nous avons pour habitude de nous positionner systématiquement au-dessus des autres acteurs dans le cadre d’une mise en concurrence. Nous proposons toujours une prestation supplémentaire afin de montrer au prospect que le coût global de notre devis est justifié. Notre valeur ajoutée, à savoir ces compétences que les concurrents n’ont pas forcément, constitue un réel élément de différenciation. »

Comment s’organiser ?

Ne pas perdre de temps ni d’argent

Parce qu’elle implique une longue phase d’écoute et de création, l’étude préparatoire d’un projet global soulève la question du risque qu’encourt le piscinier à travailler sans avoir de garanties concrètes quant aux retombées financières de cette implication. Cela prend du temps de réaliser une étude globale car l’offre étant complète, il y a énormément de paramètres à prendre en compte et à appréhender. « Plus la phase préparatoire est longue, plus il est difficile de retenir son prospect, regrette Philippe Guillot. Il existe un risque réel : le client peut parfois décider d’abandonner son projet ou le confier à un concurrent. » Dans les faits, le consommateur est facilement enclin à cannibaliser les idées des différents professionnels qu’il sollicite pour confier leur réalisation au prestataire le moins cher.

« Dans l’absolu, il faudrait être capable de fournir un devis sous 48 heures, avec des plans et un chiffrage précis », suggère Serge Renard. Mais c’est extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, pour la grande majorité des structures ne serait-ce que parce que dans le cadre d’une prestation globale, une multitude de fournisseurs seront sollicités.

L’idée d’un verrouillage progressif de l’étude, via l’approbation du devis par le client, fait consensus chez les pisciniers présents. « Il faut toujours dissocier la piscine et ses abords. Cela permet de réaliser une offre à tiroirs, avec différentes étapes qui à chaque fois viennent consolider la relation avec le client » note Stéphane Goulet. « Concrètement, nous réalisons dans un premier temps le chiffrage du bassin, expose Serge Renard. Puis nous faisons évoluer le prospect dans notre showroom. Il se rend alors compte que nous pouvons intégrer une prestation dite paysagère. S’il est intéressé, nous fixons un rendez-vous pour l’agencement de son terrain. Mais cette nouvelle étape n’intervient qu’après que le bassin a été signé. » Ce procédé permet de consolider l’avancement de l’étude mais également de gagner du temps : le chiffrage de l’aménagement du terrain se révèle beaucoup plus long que celui du bassin stricto sensu. En échelonnant les étapes dans le devis, le piscinier s’octroie une plus grande patience de son prospect.

Dans le cadre d’un projet global, les pisciniers sont ainsi confrontés à une nouvelle facette de leur métier : l’approche commerciale, bien éloignée de l’art de réaliser un bassin. Cerner les attentes, mais aussi les capacités financières du client, s’avère primordial pour éviter que le travail préparatoire demeure sans retour. « Il est évident que l’intégration paysagère trouve écho chez le client, relève Philippe Guillot. Ce n’est pas pour autant que son budget est extensible ou augmenté à la hauteur de la prestation proposée. En tant que piscinier, on mobilise du temps et des moyens humains pour mener à bien cette étude. Si elle ne débouche sur rien au final, c’est une perte financière. » Cette remarque met en lumière le problème de la maîtrise des coûts pour le piscinier qui sont plus importants, mais aussi plus difficiles à appréhender, dans le cadre d’une offre globale que pour une réalisation classique.

Une taille critique ?

De plus en plus de sociétés ont décidé d’intégrer la compétence paysagère et créative à leur structure de piscinier. « Plus l’entreprise maîtrise les compétences nécessaires à la prestation qu’elle propose, plus elle amène de garanties au client d’un point de vue contractuel », analyse Stéphane Goulet. Mais pour le coordinateur du groupement L’esprit piscine, il faut une taille critique pour pouvoir tout assurer en interne. « En dessous de 10 personnes, c’est quasiment impossible. » En effet, il faut un bureau d’études, une équipe pour le gros œuvre et le revêtement, des techniciens pour la mise en eau et le traitement, un administratif, un chef d’entreprise, etc.

« Le fait de tout internaliser génère des coûts de fonctionnement importants pour le professionnel. » Dans les faits, il peut être difficile pour l’entreprise d’arriver au point d’équilibre entre la taille de sa structure et le chiffre d’affaires qu’elle réalise. « Il y a un impératif de rentabilité pour pouvoir alimenter une grosse structure, souligne Serge Renard. Il faut donc être en mesure de répondre à plusieurs appels d’offres et surtout être capable de les remporter. C’est un équilibre difficile à trouver. »

Faire le choix du partenariat

Pour mener à bien une offre globale, il convient d’être présent sur tous les métiers et toutes les facettes de notre profession. Cela implique une certaine taille de société qui peut s’avérer difficile à maintenir. Il faut donc parfois accepter d’externaliser une partie des opérations. « La co-traitance fonctionne très bien, reconnaît Serge Renard. L’externalisation permet d’introduire une certaine souplesse dans l’organisation de la société. Elle permet également de répartir l’enveloppe budgétaire globale sur plusieurs corps de métier. » Dans bien des cas, le piscinier demeure le seul interlocuteur commercial du client mais les autres professionnels sont intégrés très tôt au projet et identifiés comme tels.

« Attention, on ne laisse pas le client seul avec les autres artisans, alerte Pierre Giguet. Même si l’on ne réalise pas de marge sur leur intervention, on reste présent à leurs côtés pour superviser les opérations. » En effet, la qualité de la réalisation globale est tributaire de ces professionnels. L’image du piscinier est en jeu. « Ces prestations que nous ne facturons pas participent à notre réputation qui nous permet de drainer de nouveaux clients. » Dans les faits, le piscinier endosse le rôle de conducteur de travaux dès lors qu’il recourt à de la sous-traitance ou de la co-traitance. C’est un point de passage inévitable pour maîtriser la qualité de la réalisation finale.

Pour Noémi Petit, « la maîtrise d’œuvre est primordiale, mais elle ne s’invente pas. Cette compétence est compliquée à maîtriser et à réaliser. L’encadrement des corps de métier requiert de l’expertise et de l’expérience ». Pour beaucoup, le salut passe par la confiance qui s’instaure progressivement avec des prestataires locaux. Tisser un réseau de partenaires est long, mais semble crucial. « Les liens que l’on peut entretenir avec les artisans locaux sont basés sur des relations durables et de confiance, confirme Serge Renard. Il existe alors un véritable engagement réciproque entre les professionnels. »

Des fournisseurs qui s’adaptent

« Notre cœur de métier, c’est la pierre reconstituée avec une production nationale, rappelle Jérôme de Mauroy, directeur marketing et communication du groupe Fabemi. Mais les attentes des particuliers nous incitent à ouvrir de plus en plus notre offre puisque nous allons progressivement proposer de la pierre naturelle et de la céramique. » Pour les professionnels également, le catalogue se veut le plus large possible, avec le référencement des incontournables de la pose : colle, plots, etc. « La grande distribution ne répond plus aux attentes, notamment à cause de stocks sans cesse réduits. Nous nous adressons donc désormais directement aux professionnels, étant capables de leur livrer les matériaux nécessaires à une seule réalisation. »

Les enjeux pour le piscinier

Laisser la piscine au cœur du projet

Les participants de cette table ronde s’accordent tous sur le fait que le contexte concurrentiel, de plus en plus exacerbé, a tendance à biaiser la perception de la valeur réelle d’une réalisation ou d’une prestation. « Malheureusement, lorsqu’il y a négociation dans un projet global, c’est souvent sur la piscine que vont être répercutées les diminutions de prix », regrette Joëlle Pulinx.

Pourtant, le cœur du projet est et restera la piscine. Il convient donc de ne jamais diminuer la qualité du bassin ou de ses équipements. « Il y a toujours des arbitrages et des affinages à faire pour s’adapter au budget du client, acquiesce Philippe Guillot. On risque de perdre le marché si on est trop écarté de la réalité du client. Mais en aucun cas on ne peut brader le bassin. »

Pour le piscinier, il peut être délicat de faire appréhender et accepter la valeur réelle de sa prestation au prospect. Par rapport à certaines offres agressives, comment le professionnel peut-il se différencier et justifier son prix ? « La survie du piscinier passe par le niveau de marge qu’il parvient ou non à maintenir sur le service, l’intégration paysagère ou les équipements », insiste Stéphane Goulet. Pour s’échapper de la course aux prix vers le bas dans laquelle le particulier veut l’entraîner, il lui faut arriver à faire valoir la valeur ajoutée qu’il est en mesure d’apporter au projet et à au bassin. « Il faut arriver à écarter le client de la notion de prix moyen d’un bassin », reprend le coordinateur du réseau L’esprit piscine. Pour qu’il comprenne la légitimité du coût d’une prestation professionnelle, « un discours didactique doit lui permettre d’appréhender la différence entre un bassin sur mesure réalisé par un piscinier et une solution industrialisée. »

Si le client n’a pas les moyens ou pas nécessairement l’envie d’une piscine paysagée, il ne faut pas hésiter à l’orienter vers un autre professionnel ou alors se positionner différemment. « À nous d’être capables de moduler notre réponse pour nous adapter au client, remarque Serge Renard. Nos réalisations vont de 15 000 € à 600 000 €. » C’est parfois compliqué, il peut être nécessaire d’échelonner les prestations, mais il ne faut pas hésiter à étager les priorités dans un projet. Il est tout à fait possible de ne réaliser que des projets complets durant toute une saison ou à l’inverse ne mener à bien que des projets de piscines plus raisonnables.

Répondre (enfin) à la demande existante

Le constat que dresse Stéphane Goulet est sans ambages : « Il y a aujourd’hui plus de demandes de projets globaux que de professionnels en mesure d’y répondre. C’est un marché qui existe depuis longtemps avec des débouchés conséquents. Avant le ralentissement du marché de la construction, les pisciniers pouvaient se permettre de ne pas le considérer. » Si les paysagistes ont pu et su capter ce potentiel, ce serait donc parce que la plupart des pisciniers ne se sont pas positionnés clairement face à cette demande. « Les paysagistes ont su amener une prestation globale, ils ont comblé le fossé entre la demande de sur-mesure en matière d’intégration et l’offre professionnelle des pisciniers. »

Pierre Giguet abonde en ce sens : « Souvent, la sollicitation ne portait au départ que sur du paysagisme pur. Mais de fil en aiguille, le projet a évolué pour finalement intégrer un bassin. Le paysagiste répond à cet appel d’offres sans nécessairement posséder les compétences en interne pour réaliser la piscine. Il ne se pose pas de question : si le prospect demande un bassin, il se positionne et répond à cette demande. » Il semble donc important de pouvoir cultiver localement un tel positionnement, avec une réelle politique de moyens. Que ce soit seule ou en collaboration avec d’autres intervenants, une structure doit aujourd’hui être en mesure de répondre de manière globale aux attentes des particuliers sous peine de voir s’échapper leurs projets.

La création n’est pas le seul domaine où il y a une place pour l’émergence d’un seul et unique interlocuteur. Sandrine Ligonnet observe ainsi une véritable demande de suivi sur le long terme de la part des consommateurs. « Je constate pourtant qu’il y a un véritable déficit dans ce suivi. Il n’y a pas de référents clairement identifiés. » Pour la réalisation des piscines, les paysagistes ont su s’intégrer et se positionner sur une offre globale. Et pour l’entretien du bassin et de ses abords, ce sont des entreprises spécialisées dans la maintenance qui ont su émerger.

Ce débouché de l’entretien et de l’accompagnement constitue pourtant un potentiel de chiffre d’affaires supplémentaire pour le piscinier. « Nous encourageons les membres de notre groupement à systématiquement donner au client une estimation prévisionnelle des coûts de fonctionnement de son bassin et à formuler des propositions de contrat de maintenance et d’entretien », confie Stéphane Goulet. Cette approche commerciale permet de casser les fantasmes relatifs au coût d’une piscine. Car dans les faits, si c’est bien géré, la gestion et le fonctionnement d’un bassin ne sont pas onéreux. « Concrètement, la somme que l’on avance pour une piscine traitée 100 % manuellement au chlore est de 700 € par an. Ce prix comprend entre autres l’alimentation en eau et la consommation de produits. » À partir de là, le piscinier peut justifier le coût de sa prestation d’entretien, avec une offre transparente clairement détaillée mettant en exergue le taux horaire des interventions. « Si elle est lisible, la prestation professionnelle jouit d’une certaine crédibilité », appuie le coordinateur du groupement L’esprit piscine. Son tarif est alors justifié aux yeux du client qui a conscience des compétences et du savoir-faire requis pour le service auquel il va souscrire. « Attention, cela implique évidemment une obligation de résultats. »

Se positionner sur la petite collectivité

Les nouvelles réglementations en matière d’urbanisme ont entraîné une diminution du nombre de constructions individuelles au profit de projets d’habitats collectifs. Il faut donc y voir un nouveau débouché ! Aux yeux des professionnels réunis par L’Activité Piscine, ce marché du collectif privé s’approche naturellement par le biais de l’entretien et de la maintenance. Stéphane Goulet nuance quelque peu cette vision en rappelant que ce segment de marché est encore difficile à cerner et qu’il reste difficile de se positionner dessus. « On a effectivement observé une multiplication des projets collectifs intégrant une piscine, mais la tendance semble être le retour à un simple terrain. Il apparaît en effet que dans le cadre d’une copropriété, un bassin est générateur de nuisances sonores et de charges financières pas toujours facilement acceptées par les propriétaires. »

Créer un lien durable avec sa clientèle

L’offre globale intègre toutes les prestations que le particulier est en droit d’attendre, de l’intégration jusqu’à la maintenance et à l’entretien. Ce dernier aspect est parfois délaissé par les pisciniers.

« Le service et la maintenance rassurent le client, rappelle Julien Janzegers. Tous deux permettent de consolider la relation client. » L’idéal serait d’assurer de manière systématique la maintenance du bassin la première année d’utilisation. Le piscinier offre ainsi à son client une belle piscine, intégrée à son environnement, qui fonctionne sans problème. Il répond de cette manière aux principales attentes formulées par le grand public si l’on se réfère à l’étude “Les Mots de la piscine‿ commanditée par la FPP. De cette manière, il pose les jalons d’une relation qui est appelée à perdurer. « En offrant, même de manière artificielle, une première année d’entretien à son client, le piscinier dispose de toutes les cartes pour garder du lien durable avec lui », confirme Sandrine Ligonnet. Il peut ensuite légitimement lui proposer des contrats d’entretien et de maintenance. « Attention, il convient de facturer réellement sa prestation ! En aucun cas il ne faut chercher à minimiser le coût de son intervention. »

Proposer une offre élargie, et donc globale, en magasin est également un levier à la fidélisation de la clientèle, suggère Jérôme de Mauroy. « Une gamme diversifiée, que ce soit en termes de mobilier de jardin, de végétaux ou d’éléments de décoration, est susceptible d’inciter le consommateur à renouveler l’environnement de sa piscine. » Il en résulte un chiffre d’affaires additionnel et cette relation permanente peut fort logiquement déboucher sur un projet de rénovation du bassin. L’offre est alors globale de bout en bout.

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