Interview réalisée le 15 juin 2023
Titré Meilleurs Ouvriers de France en 2019, Matthieu Scanzi a créé Scanzi Piscines en 2009, son entreprise. Sa zone de chalandise, le Gard, est l’une des plus touchée par le manque d’eau.
La situation est très difficile dans votre département. Quels sont les effets sur votre activité ?
Depuis quelques années déjà, nous nous sommes positionnés sur le marché haut de gamme en tenant compte des problèmes de climat. Nous nous inscrivons dans une démarche de qualité (avec prestations complètes comprenant piscine, équipements, aménagements), et pas de quantité. Notre panier moyen tourne aux alentours de 70 000 € avec chaque année, un projet sortant de l’ordinaire (représenté par un bassin à 180 000 € pour cette année).
Tous les clients ne sont pas sensibles aux problèmes de sécheresse, mais nous l’évoquons systématiquement lors de nos discussions en amont du projet ; et notre marché nous permet de proposer des équipements en adéquation avec notre sensibilité face à l’écologie.
Cette année, nous avons poursuivi les chantiers et les bassins n’étaient pas tous prêts pour les remplissages lors des interdictions, ce qui est finalement bien tombé. Difficile d’envisager un arrêt net de l’activité et mettre huit personnes au chômage technique. Grâce aux récentes pluies, le département a évolué en terme de vigilance, ce qui nous a permis de travailler de manière plus sereine et terminer les bassins.
En terme de prospects, nous n’enregistrons actuellement pas de baisse car c’est surtout des mois d’août à d’octobre que les gens viennent nous solliciter pour leur projets. Au printemps, nous sommes tellement sur le terrain que je ne prends aucun rendez-vous, sauf cas exeptionnels. En 2023, notre chiffre d’affaires baissera légèrement. C’est une démarche volontaire car nous avons revus nos objectifs à la baisse, afin de garder le contrôle du travail bien fait, et conserver une qualité de prestations maximale. Pour 2024, nous avons déjà de très beaux projets engagés.
Les autorisations sont-elles plus difficiles à obtenir ?
Non, pas pour l’instant. Les contraintes viennent plus du trop d’eau durant les épisodes cévenols que du manque d’eau (obligation de réaliser des bassins de rétention et systèmes de drainage des eaux de pluie…). Nous n’avons subi aucun refus lié à la pénurie. Nous sommes sur un projet important, 16 m sur 5 (pour lequel une couverture est prévue). Le client a eu son autorisation de travaux.
Avez-vous adapté votre offre au réchauffement climatique ?
Oui. Depuis 2017 déjà, nous veillons à optimiser la consommation des piscines en eau et en électricité.
Nos structures ne sont pas très profondes (1,50 m) mais suffisamment pour une baignade confortable. Nous n’installons que des filtres à éléments, qui nécessitent un seul nettoyage par an, au lieu d’un par semaine pour un filtre à sable. La quasi totalité de nos piscines sont couvertes pour limiter l’évaporation de l’eau, et leur traitement est automatique (lampe UV et injection d’oxygène actif). La programmation de la filtration est également automatisée, optimisée en fonction des besoins. Nous expliquons aux clients qu’il est inutile de vidanger leur piscine pour l’hivernage.
Ces derniers ont les moyens de doter leurs piscines d’équipements qui permettent de réduire l’impact écologique d’une piscine à son maximum, et nous font confiance pour le choix du matériel.
Comment voyez-vous l’avenir ?
Je reste optimiste. La demande ne baisse pas et devrait se maintenir avec la montée des températures. Cela fait des années qu’on nous parle du manque d’eau. Ici, dans le sud, les gens ont intégré cette contrainte. Sur le haut de gamme, les piscines sont équipées pour en tenir compte, nos clients acceptent le surcoût que cela entraîne. Je pense que la réglementation va changer d’ici deux ou trois ans, et nous continuerons d’évoluer en en tenant compte. Et puis, plus de contraintes, c’est plus de rénovations. Au départ de mon activité, je ne faisais que ça. Aujourd’hui, cela représente 50 % de mon activité, mais nous nous positionnons uniquement sur les travaux de rénovation ambitieux (en ne conservant que la structure du bassin et en remplaçant absolument tout le reste).
Propos recueillis par la rédaction
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