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Photomètres : attention à l’entretien et à l’étalonnage !

par laurence

Photomètre avec disque de réactifs (Spintouch de Lamotte)

Outil d’analyse de l’eau professionnel par excellence, le photomètre n’en est pas moins un appareil qui doit être entretenu et étalonné régulièrement. Or, bien souvent, les experts constatent que les professionnels ne pensent pas à effectuer les opérations nécessaires à son bon fonctionnement au détriment de la qualité de leurs analyses et de leurs interventions, avec, à la clé, un réel risque judiciaire. Avec Christèle Ageorges, Xavier Darok et Mathias Werner.

 

Le coin des Experts est une nouvelle rubrique de L’activité Piscine. Objectif : réduire vos risques de litiges à une époque où les clients sont davantage informés et prompts à déclencher une procédure juridique à votre encontre, dès lors que vous n’auriez pas respecté une étape, une consigne ou une règle lors de vos interventions sur sa piscine. 


Le constat : « Un photomètre mal calibré et c’est toute la science du piscinier qui s’envole »

« La réglementation veut qu’un piscinier qui entretient des piscines collectives (hôtels, campings, etc.), étalonne son photomètre chaque année. Dans la piscine privée, il n’y a pas de réglementation, mais il est fortement recommandé de l’étalonner tous les deux ans. Dans les faits, il s’avère souvent que le piscinier va l’utiliser pendant 5 ans sans l’étalonner. Et ce n’est pas le seul dysfonctionnement identifié. L’appareil est sensible aux variations de température. La qualité de sa mesure sera donc impactée s’il reste dans le camion, été comme hiver. Autre problème, le nettoyage et le rangement de l’appareil après usage. Une fiole d’analyse juste rincée ou encore humide ne délivrera pas la bonne information. Et s’il n’est pas calé correctement pendant son transport entre deux chantiers, le réactif subit des secousses, ce qui n’est pas non plus propice à une bonne analyse. Les détecteurs optiques pourraient alors être endommagés. Les experts constatent également que, très souvent, les professionnels mesurent le taux de chlore libre et le pH mais ne pensent pas à analyser le chlore total (DPD3), après la mesure de DPD1. Quant à la date de péremption des pastilles, les techniciens oublient bien souvent de la vérifier au moment de leur utilisation. Il existe enfin un défaut de formation à l’utilisation de ces appareils, les professionnels ne lisant pas tous la notice jointe ou ne consultant pas les tutoriels des fabricants pourtant mis à leur disposition.»

De l’importance d’utiliser du matériel professionnel…

« Un piscinier professionnel doit avoir des outils professionnels sinon c’est sa crédibilité qui est en jeu. 30% d’entre eux seulement seraient équipés de photomètres. Beaucoup utiliseraient même les bandelettes de leur client pour ne pas sortir leur matériel du camion. Les pisciniers doivent comprendre l’intérêt d’avoir une approche professionnelle de l’analyse de l’eau, comme le font les garagistes avec leur valise électronique. Quand on rencontre les dirigeants en formation, ce discours est bien compris. Mais sur le terrain, quand on parle avec les techniciens, on se rend compte que leur patron leur fixe un timing précis à respecter avec ¼ d’heure par piscine, alors qu’il faut 15 minutes pour préparer correctement une analyse. Ils prennent donc une bandelette. Et comme souvent l’éprouvette de test n’est pas correctement nettoyée, on perd en fiabilité de résultat. Si l’analyse est mal faite, il faut revenir chez le client, ce qui implique un nouveau déplacement et donc un coût horaire supplémentaire qu’on ne peut pas facturer. Enfin, on n’utilise pas de bandelettes pour vérifier une piscine traitée par électrolyse.

Autre problème des bandelettes : les valeurs recommandées « OK » des paramètres sont en dehors des normes piscines. Pour le TAC, elles sont entre 80 et 120 ppm alors qu’il faudrait avoir OK pour 150-180 ppm ou 180-240 ppm en fonction des bandelettes. Même chose pour le TH, avec 100-250 ppm OK alors que les bandelettes préconisent 250-450ppm. On est également dans une course au plus avec le maintien d’un taux de chlore libre à 3 ppm alors qu’il faudrait qu’il soit à 1,5 ppm. On a un problème de lecture de la notice fabricant qui indique les marges à respecter. Une notice que lisent le client et l’expert ! »

À noter : Il est recommandé de ne pas utiliser des bandelettes classiques pour vérifier une piscine traitée par électrolyse (sauf bandelettes d’analyse du taux de sel).

Photomètre avec réactif en pastilles (Pooltester – Bayrol)

… et de prendre le temps pour chaque analyse de l’eau

« Si les professionnels ne prennent pas le temps de vérifier l’équilibre de l’eau à l’ouverture de la piscine, ils en disposeront encore moins en saison et auront donc un problème d’eau à gérer avec le risque d’avoir un expert d’assurance sur le dos. Ce discours passe de mieux en mieux auprès des entreprises qui se professionnalisent. Mais il reste difficile à entendre de la part de celles qui font surtout de l’entretien. Les professionnels ont encore des réticences avec la domotique, notamment sur le prix du matériel, alors qu’elle leur permet d’être informés des variations des paramètres de l’eau de la piscine de leurs clients pour intervenir plus rapidement et éviter ainsi des problèmes. C’est primordial quand on a un parc de 600 à 700 bassins à gérer afin de savoir sur lequel intervenir en priorité. Ils peuvent d’ailleurs proposer au client la location/vente de l’appareil pour en amortir le coût sur plusieurs années. C’est particulièrement intéressant quand on répond aux appels d’offres des copropriétés. Avec le même budget, ils peuvent démontrer l’intérêt de la solution domotique.
Le piscinier qui n’est pas encore prêt à franchir ce pas, doit toujours avoir avec lui un pot de bandelettes 7 paramètres pour identifier rapidement le problème et ensuite analyser les paramètres avec le photomètre. Cela lui permettra de gagner du temps.
Attention : la boîte de bandelettes, une fois ouverte, ne doit pas être gardée plus d’un mois avec des utilisations très fréquentes. »

Les conséquences d’un étalonnage irrégulier du photomètre

1. Davantage d’interventions chez les clients pour répondre aux problématiques suivantes :
• des eaux plus agressives ou un entartrage du bassin,
• des appareils et des revêtements qui se détériorent plus rapidement,
• des insuffisances de traitement avec des désinfectants qui fonctionnent peu voire pas du tout,
• des surconsommations de produits, d’eau ou d’énergie,
• le verdissement de l’eau,
• des désagréments au niveau de la baignade,
• voire le développement de maladies comme des otites, sinusites ou angines…

2. Avec une sonde redox, un défaut de contrôle de tous les taux réels de chlore (chlore actif, chlore libre, chlore total) peut compliquer l’identification du véritable problème et fournir des résultats d’analyse peu fiables ou incohérents. Comme les pisciniers pensent souvent que le redox indique le taux de chlore (cf. « Le redox, un indicateur avant tout » – L’activité Piscine n°125), ils font donc des chlorations chocs alors que le problème est ailleurs. Il y a souvent des questions de conductivité liées à la température de l’eau ou à la présence de métaux dans l’eau (cuivre, fer…), ou des courants vagabonds suscités, par exemple, par un problème de mise à la terre. Pour prendre en compte les millivolts (mv) présents dans l’eau et mesurer la conductivité, il est obligatoire de s’équiper d’un crayon électronique ou d’un pH-mètre avec double sonde, surtout avec des eaux à +30°C. Les valeurs redox étant plus basses pour des températures élevées, l’appareil produira ou injectera davantage de chlore afin de compenser ces écarts, créant ainsi des « mini chlorations chocs ». En étalonnant correctement la sonde redox en début de saison et au mois de juin, on peut s’assurer de rester dans une plage de +/-5°C pendant toute la saison. D’où l’importance, encore une fois, de la lecture de la notice pour se référer aux courbes de comparaison.
Rappel : la sonde est un consommable dont la durée d’utilisation peut atteindre 24 mois si elle est bien entretenue. A l’hivernage, elle doit être sortie du circuit et stockée dans un lieu tempéré dans sa solution d’origine ou une solution tampon à la date limite dépassée (ce qui réduit d’ailleurs le gaspillage). Une sonde qui a séché est une sonde morte.

À noter : en cas de problème de traitement ou sur le revêtement (plus, taches…), il est important de vérifier et de réétalonner les sondes. On a besoin pour cela d’appareils d’analyse efficaces.

Comment étalonner un photomètre ?

« Pour étalonner un photomètre, il faut procéder à un auto-contrôle avec des fioles préremplies et calibrées avec la bonne couleur pour l’analyse du chlore libre, du chlore total, du pH et du stabilisant. Ces solutions d’étalonnage ont une durée de vie de 2 ans et peuvent paraître relativement chères, à tel point que de nombreux pisciniers ne les achètent pas. Il est plus pratique de réaliser le test en hiver afin d’envoyer l’appareil en réparation, si besoin, pour être certain qu’il soit bien étalonné en mars. Selon la façon dont le photomètre est stocké en hiver, il peut être nécessaire de revérifier son calibrage au début de la saison. »

Règles d’utilisation d’un photomètre

1. Prélever l’eau correctement, mettre la bouteille pour analyse vers le bas, la plonger à profondeur de bras et à la moitié de la longueur de la piscine. Ne pas prélever en surface ni devant les refoulements.
2. Bien remplir la fiole d’analyse jusqu’au trait.
3. 
Utiliser la bonne pastille, bien l’écraser, et attendre qu’elle soit totalement fondue.

4. Laisser le temps à la réaction, la lecture n’est pas toujours immédiate (voir le mode d’emploi du fabricant). 
À noter que les nouveaux photomètres tiennent compte de ces temps de réaction.


Bien nettoyer et ranger ses photomètres

« Pour une analyse de l’eau fiable avec un photomètre, il est très important que le photomètre et ses fioles soient bien nettoyés et sans trace de dépôt ou d’humidité. Or, trop souvent, on constate que les techniciens n’ont pas de chiffon dédié et les frottent avec un tissu ou un ustensile ayant déjà servi. L’usage d’un goupillon n’est pas non plus recommandé, la présence d’un dépôt dénotant un mauvais nettoyage ou un écrasement des pastilles. Il est conseillé d’investir dans un jeu de fioles d’analyse supplémentaires (vendus par 5) pour en avoir une par paramètre à analyser et permettre aux autres de sécher correctement. Attention aux solutions tampon qui restent dans un local ou un camion pendant plusieurs mois à des températures parfois extrêmes. Veiller à respecter les conditions de stockage et les dates limites d’utilisation du fabricant.
Bien ranger les photomètres dans leur housse et les stabiliser pendant leur transport. Ces appareils électroniques sont fragiles et n’aiment pas être trop secoués. S’assurer également que les fioles sont bien sèches, l’humidité perturbant l’électronique et pouvant faire apparaître des points de corrosion sur l’appareil.

Les bons paramètres de l’eau ?

« L’équilibre de l’eau doit se faire obligatoirement à chaque début de saison de toute piscine ainsi qu’à la mise en service d’un appareil de traitement quelle que soit la période d’installation. Il est recommandé d’ajuster l’équilibre si besoin en cours de saison, en cas d’eau chaude ou fortement agitée (nage à contrecourant, cascade…).

À noter : Il faut prévoir les consommations / pertes de la saison et tenir compte de l’eau elle-même, de l’environnement, du revêtement… pour bien équilibrer l’eau en début de saison. 

 Le TAC doit se situer entre 15°f (150 ppm) et 25°f (250 ppm) ou 18°f (180 ppm) maximum avec une sonde redox. Une piscine perd en moyenne chaque mois 40  ppm (ou mg/L) de TAC, il faut donc le surveiller régulièrement faute de devoir en rajouter beaucoup, ce qui coûte cher, sachant qu’en plus il est compliqué de l’introduire en saison à cause de la température.

Le TH doit être le plus proche de 15°f (150 ppm).

 Le taux de chlore doit se situer entre 1 et 1,5 ppm mais cela dépendra du bassin, des pollutions possibles, du nombre de baigneurs réguliers, etc. 1 ppm de chlore peut suffire avec peu de pollutions mais il en faudra 1,5 à 2 ppm si elles sont importantes. À 3 ppm, on est quasiment dans le cas d’une chloration choc. Charge au piscinier de juger du bon dosage en fonction de son estimation de la situation. Il est ainsi possible de doser à 1 ppm et d’ajouter des pastilles effervescentes le week-end (dosage recommandé : 1 pastille de 20 g pour 10 m3 permettra de remonter de 1 ppm le taux de chlore libre) pour monter temporairement le taux de chlore à 1,5 ou 2 si la piscine est très utilisée afin de la surprotéger et d’absorber la pollution présente. Tout dépend bien sûr de l’utilisation de la piscine et de la propreté du bassin.

Le pH doit être entre 7 et 7,4 pour une désinfection chlorée.

 Le taux de stabilisant doit être le plus bas possible en début de saison. La tendance actuelle est à l’anti-stabilisation. Or, le stabilisant est nécessaire dans une piscine extérieure. Sa bonne teneur est fonction de l’utilisation du bassin. Il doit être de 20-30 ppm avec une sonde redox, et de 30-50 ppm pour tout autre système en début de saison. Il va ainsi protéger et donner davantage de rémanence au traitement par électrolyse ou avec du chlore liquide. Il permet de réaliser des économies en consommant moins de produit, en réduisant le travail de la cellule et en prolongeant sa durée de vie. Le principal est de ne pas dépasser 100 mg/litre. Tout dépend ensuite de la qualité des galets et de la manière de les utiliser. Une fois le galet fondu, il faut vérifier le taux avant d’en remettre un. S’il est trop élevé, cela peut perturber la mesure. Le principal est de ne pas dépasser 75 ppm (ou mg/L). 

Dans le cas d’utilisation de chlores stabilisés en galets, tout dépendra ensuite de la qualité des galets et de la manière de les utiliser. Il est nécessaire de vérifier la valeur du stabilisant une fois par semaine pour les piscines privées à usage collectif et une fois par mois pour les piscines privées. S’il est trop élevé cela perturbe l’efficacité du chlore.

 Le taux de phosphates doit être inférieur à 100 ppb ou 10 g/100 m3 (0,1 mg/L). »

Le conseil de l’expert piscine : laisser une trace écrite

Le technicien chargé de l’entretien doit tout faire signer au client, y compris l’analyse des paramètres de l’eau à la mise en route du bassin. Une fois équilibrée et propre à la baignade (un compte-rendu d’analyse daté avec la valeur idéale des paramètres faisant foi), il faut faire signer un procès-verbal de réception de l’équilibrage de l’eau. Ce qui sera fait ensuite par le client ne pourra pas être reproché au piscinier.
On notera à défaut de PV de réception, qu’une facture acquittée est un document contractuel, par conséquent tout ce qui y figure constitue une trace validée par le client.


Autre problème, le vieillissement de l’eau

« On conserve les eaux beaucoup plus longtemps qu’auparavant et avec le développement de “l’outdoor living”, ces dernières années, les sources de pollution ont augmenté. Plus de plantes, sources de phosphates (pollution végétale qui reste dans le bassin) et donc d’algues, évolution des matériaux des revêtements, plus de volets installés également en fosse ou en plage. Combien d’ailleurs ouvrent le bac du volet pour le nettoyer ? 

De plus en plus de polluants arrivent dans l’eau sans que les habitudes des pisciniers changent. Les filtres sont plus performants mais pas toujours bien dimensionnés et les temps de filtration sont souvent trop faibles. Ils accumulent ainsi davantage de résidus qui se dégradent et restent dans l’eau.

Aujourd’hui on assiste à un vieillissement de l’eau en France. En Angleterre, les piscines sont vidangées chaque année. En Allemagne, les baigneurs se lavent avant d’entrer dans l’eau. Le renouvellement d’eau par 1/3 chaque année est donc très important, que ce soit au moment d’un hivernage passif ou lors de la remise en route pour renouveler l’eau et éliminer une part de ces polluants. Cela demande du temps au technicien. Et comme il y a de moins en moins de bondes de fond, il faut une pompe et… encore plus de temps. »

Avec Xavier Darok, docteur en chimie / Christel Ageorges, expert en piscines et spas, traitement de l’eau et formatrice / Mathias Werner, expert en traitement par électrolyse

Texte : Sébastien Carensac

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