Noyades en piscine

by laurence

Vers une hausse de l’accidentologie ?

L’été s’achève et avec lui une couverture médiatique loin d’être valorisante pour la piscine. Entre les restrictions d’eau inhérentes aux épisodes de sécheresse et les dramatiques noyades d’enfants, le traitement réservé à notre marché n’a pas été positif. Faut-il y voir une sorte de bashing parfois partisan ou bien considérer que ces critiques sont bien fondées ? Nous ne traiterons pas ici de la consommation en eau d’une piscine, mais uniquement de l’accidentologie estivale qui survient lors des baignades. En la matière, les statistiques ne mentent pas.
Et elles ne jouent pas en faveur de la piscine.

 

Recenser tous les accidents de cet été est très difficile, pour ne pas dire impossible. Tirer des enseignements sur l’évolution de l’accidentologie par rapport à l’an dernier l’est tout autant. Notre analyse se base donc exclusivement sur l’enquête “Noyades” réalisée en 2018.

Les enquêtes “Noyades” sont coordonnées depuis quinze ans par Santé publique France (anciennement Institut de veille sanitaire). Depuis 2006, cette surveillance épidémiologique est menée tous les trois ans entre le 1er juin et le 30 septembre. L’enquête “Noyades” définit la noyade comme « une insuffisance respiratoire résultant de la submersion ou de l’immersion en milieu liquide ». Au sens strict, la noyade est suivie d’un décès. Mais, dans ces enquêtes, Santé publique France emploie le terme de “noyade” au sens large, qu’elle soit suivie ou non d’un décès. Les noyades répertoriées sont celles qui ont nécessité l’intervention de secours organisés et qui ont débouché sur une hospitalisation.

noyades

Une forte hausse du nombre d’accidents

On recense en 2018 une très forte hausse des noyades accidentelles, tous lieux de baignade confondus. Santé publique France évoque « un effet de saisonnalité (davantage de noyades pendant les week-ends, particulièrement en période de vacances) et un effet de la température (davantage de noyades pendant les périodes de fortes chaleurs) ». En effet, selon son rapport, « l’été 2018 a été classé par Météo-France comme le deuxième été le plus chaud depuis 1900, avec une température moyenne sur la France supérieure à la normale (moyenne de référence 1981-2010) de 2 °C, se classant derrière l’été 2003 (+ 3,2 °C). Ces deux effets pouvaient se cumuler, comme l’indiquait le pic de noyades observé le premier week-end d’août (5-6 août), au plus fort de l’épisode de canicule de l’été 2018, et les pics de noyades en juillet, au début des vacances ». Il convient cependant de ne pas occulter le mois de septembre, durant lequel l’accidentologie en piscine privée familiale a été très élevée. Plusieurs explications peuvent être avancées, au premier rang desquelles des températures estivales encore présentes et une possible baisse de vigilance à une période où la plupart des familles ont repris un rythme classique école-travail.

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La proportion de noyades survenues dans le parc de piscines privées (qu’elles soient familiales ou à usage collectif) est en hausse, comme en 2015. Alors que depuis 2006, la part de noyades ayant eu lieu dans une piscine privée se réduisait, le rebond entamé en 2015 fait à nouveau de ces bassins privés des lieux de baignade accidentogènes. La part relative d’accidents ayant eu lieu en piscine privée passe ainsi de 13,75 % en 2006 (166 événements sur 1207 noyades accidentelles recensées) à 24 % en 2018 (396 événements sur 1649 noyades accidentelles recensées). Seul point positif, la part relative et absolue de décès ayant eu lieu dans ces mêmes lieux est en baisse. Cela laisse simplement à penser que la victime a été prise en charge à temps, mais ne laisse en rien présager des séquelles potentielles.

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Des chiffres inquiétant pour la piscine

Si l’on se focalise sur les piscines privées à usage familial, l’augmentation du nombre d’accidents est très nette (309 en 2018 vs 173 en 2015). Surtout, cette hausse de l’accidentologie est encore plus marquée pour les enfants (0-6 ans).

Tous lieux de baignade confondus, le total de noyades accidentelles concernant les moins de 6 ans a ainsi augmenté de 96 % entre 2015 et 2018.

Mais dans les piscines familiales, l’augmentation est de 132 % sur la même période. Dans cette catégorie, le nombre d’accidents survenus en piscines hors sol est en très forte hausse. Ces bassins concernaient 9 % des incidents en 2015, ils passent à 22 % en 2018. Cela laisse à penser que l’élévation des températures incite de plus en plus de foyers à se doter d’une solution de baignade accessible, le budget limité reléguant au second plan la question de la sécurité. Enfin, il convient une fois encore de souligner le fait qu’énormément d’accidents ont eu lieu en septembre. À cette période, la fatalité de la noyade est plus forte que sur le reste de la période couverte par l’enquête “Noyades”.

En 2018, 25 % des noyades en piscine privée familiale ont été recensées au mois de septembre, mais la part de décès sur ce mois s’élève à 32 %. Cette constatation vaut pour toutes les tranches d’âges, mais se vérifie malheureusement surtout pour les enfants de moins de 6 ans.

Ainsi, sur 50 noyades d’enfants recensées en septembre (sur un total de 223 pour la période), 8 ont été suivies d’un décès (sur un total de 25 sur la période entière).

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Texte : Benoît Viallon

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